[Sélection du mois] Top 5 tracks rap US par Florian Gilleron

Nouvelle formule ce mois-ci pour nos news rap US. Notre spécialiste, Florian Gilleron, change sa donne pour ItinéraireBis et remplace ses chroniques d’albums par un top 5 tracks mensuel pour rester au courant des dernières sorties rap Outre-Atlantique.

Young Scooter vient clôturer ce premier Top 5 tracks rap US
Young Scooter vient clôturer ce premier Top 5 tracks rap US

 Chief Keef – What Up ?

Keith Cozart n’a pas encore 20 ans (on aurait parfois tendance à l’oublier) mais possède pourtant l’esprit artistique le plus créatif dans le rap actuel; sa dernière et excellente mixtape « Sorry 4 The Weight » en est une nouvelle fois la preuve. Qui aurait pu prédire que le responsable du tube de l’année 2012 rapperait deux ans plus tard sur ses propres productions à base de… bongos ? C’est pourtant ce qu’il se passe par exemple sur « What Up ? », qui voit Chief Keef nous gratifier d’une instru qui fourmille de détails qui tuent.

Là où 99% des rappeurs seraient incapables de poser sur une prod avec une rythmique aussi insaisissable, lui y arrive avec une facilité déconcertante, variant les flows et les tons comme jamais.
Chief Keef est seul sur sa lointaine planète, Chief Keef fait ce qu’il lui plaît (avec ou sans major derrière lui), Chief Keef ne regarde pas ce qui se fait autour de lui, et c’est d’autant mieux pour nous.

 

Drake – Company (Sango Remix)

 

Si vous comptez sur moi pour faire l’éloge du dernier projet de Drake sorti de nulle part (ou comme on dit maintenant : à la Beyoncé), passez votre chemin. Malgré tout l’amour que je porte pour Aubrey (no homo) depuis la sortie du chef-d’oeuvre qu’est « Take Care », impossible de m’enthousiasmer pour ce demi-album/demi-mixtape. Tout n’est pas à jeter certes, mais quand on voit que la quasi-intégralité des morceaux du projet est classée dans le Billboard Hot 100 (égalant au passage un record des Beatles vieux de 51 ans), il est simplement temps d’admettre que quoiqu’il fasse, de par son statut de mégastar, Drake rencontrera à chaque fois le succès et ce peu importe la qualité de ses projets.

Mais heureusement que le Dieu international du remix aka Sango est passé par là, arrivant à donner un second souffle et un réel intérêt à un morceau qui était bien trop triste dans sa version originale. La voix de Drake prend ici une toute autre dimension, beaucoup moins superficielle. Et cerise sur le gâteau, Sango nous épargne même l’intervention du toujours très surcôté Travi$ Scott en fin de morceau. Validation totale donc.

 

Maxo Kream – Paranoia

Loin d’Atlanta, LA ou Chicago, on aurait tendance à oublier que Houston reste une ville majeure dans le rap américain. Certes ses têtes d’affiche ne font plus vraiment parler d’elles mais la relève est bien là, tapie dans l’ombre. Maxo Kream en est un des plus sérieux fers de lance, et avec cette seconde mixtape nommée « Maxo 187« , il confirme tout le bien que l’on pouvait penser de lui. La preuve avec ce « Paranoia », un morceau brut et limite hypnotisant, où le texan donne tout ce qu’il a pendant près de quatre minutes, sans forcer.

Pas de refrain, juste des rimes qui s’enchaînent, avec un texte qui reste assez dur par rapport à son vécu de dealer de drogue mais juste assez teinté d’humour, voire parfois de mongolerie, pour nous donner le sourire. « I don’t go to war, the shit I do is terrorism/Leave your grandma in the house with her head missing » ou encore « I can spot a pussy nigga with my third vision ». Et on n’oublie pas bien sûr le très efficace passage en chopped and screwed, histoire de nous rappeler qu’on est bel et bien au coeur de Houston.

 

Oba Rowland – YNCU

Avec la surprise de 2014 DeJ Loaf, Oba Rowland est un des rappeurs de la scène underground de Detroit les plus passionnants. Entouré de ses acolytes du IBGM (« I Been Getting Money »), il vient de sortir une très solide seconde mixtape, où il parvient sans aucun problème à montrer l’étendue de ses talents. YNCU est l’intro de ce projet et frappe fort d’entrée.

Et pourtant tout porte à croire que ce morceau sort tout droit d’un des derniers projets de la légende de la Bay Area E-40. De l’instru typiquement hyphy qui sent bon la côte ouest, jusqu’au flow ou même la voix du natif du Michigan, impossible de ne pas y voir de fortes similitudes avec Earl Stevens. Mais n’ayez crainte, Oba Rowland a assez de charisme pour se créer son propre personnage et est surtout incroyablement habile micro en main : techniquement c’est très fort, même si d’une oreille distraite on n’en aurait pas forcément l’impression.

 

Young Scooter – Count Up

Black Amigo Gang, that’s the clique I claim/And I don’t see no other rappers, I’m in my own lane.

Un peu à la manière de Chief Keef, Young Scooter opère seul sur son terrain de jeu. Quand 99% du reste de la scène d’Atlanta fait de la trap music, lui a inventé son propre genre : la count music. Musique destinée en premier lieu à être écoutée pendant que tout citoyen normal compte son oseille amassé après une dure journée passée à « trapper » dans sa « bando », elle n’en demeure pas moins très addictive de par son côté réaliste et toujours très musical.

Young Scooter, c’est donc un univers qui tourne à 100% autour de l’argent. La vie est trop courte pour le reste, et en bon héritier de Gucci Mane, il doit faire son maximum pour se faire le plus d’argent possible tout en évitant de (re)passer par la case prison.

Comme vous l’aurez compris de par son titre, « Count Up » ne déroge pas à la règle, et les quelques notes de piano qui se répètent inlassablement durant le refrain, ajoutées aux paroles de Scooter (de véritables prêches) renforcent encore plus le côté urgent de son projet personnel.

On est donc assez loin du Young Scooter invité par Brodinski pour poser sur son album, et si vous l’avez découvert à cette occasion, je vous conseille vivement d’écouter ses deux mixtapes « Street Lottery », qui contiennent leur lot de morceaux assez incroyables comme « Colombia« , « What Happened To Me » ou encore « Chances« , ces deux derniers comptant sûrement les refrains les plus authentiques jamais entendus dans l’histoire du rap.