INTERVIEW : Rencontre avec UTO

Nous avons rencontré Neysa May Barnett et Emile Larroche afin d’en savoir plus sur eux, leur histoire et leur musique : un bref coup d’œil dans le rétroviseur, le présent et le futur. « Shelter For The Broken » le nouvel EP du duo UTO est sorti sous les couleurs de Pain Suprises Records.

Est-ce que ça vous dirait de vous faire tirer le portrait ?
On commence par toi Neysa, où as-tu grandi et quel parcours scolaire as-tu emprunté ?

N: Je m’appelle Neysa May Barnett, née d’une mère française et d’un père anglais, dans la banlieue sud de la région parisienne, à Fresnes, dans l’ombre de la Prison. C’est au lycée que j’ai commencé à devenir studieuse et à me passionner pour la littérature, ce qui m’a dirigée vers des études de lettres et arts à l’Université Paris VII Diderot jusqu’en Master II.

Tu sembles être en perpétuelle quête de culture, une soif intarissable, d’où vient cet appétit ? Musique cinéma théâtre littérature, dis m’en plus sur tes goûts.

N: L’appétit il vient, on mange car on a faim. Je me sentais seule à l’école et à la maison. Quand on est seul, on cherche des voix pour nous peupler à l’intérieur. Ainsi quelques noms ont élu domicile chez moi : Bernard-Marie Koltès, Beckett, Jacques Dupin, Marguerite Duras, Roberto Bolano, Marina Tsvetaeva pour la littérature. C’est une littérature que je qualifierais de violente. En musique, dès gamine, Portishead, Rickie Lee Jones, Sibylle Baier et plus récemment, Angel Olsen, Fela Kuti et Weyes Blood.

Tu as la plume facile ? As-tu posé des mots sur un autre format que des chansons ?

N: Pour répondre à ta question sur l’écriture, je n’ai pas abandonné l’écriture en français, dans mon gros dossier d’ordinateur « Chantiers » se dissimulent des débuts d’essais, des nouvelles écrites à 20 ans, des poèmes, et plus récemment des chroniques sur des musiciens. J’attends d’en avoir suffisamment pour en faire quelque chose.

Emile, même question, tu as ciré les bancs du 4ème arrondissement de Paris durant l’époque Collège il me semble, qu’es-tu devenu ensuite ?

E: J’ai été au collège Charlemagne avant de rentrer au lycée Racine en horaires aménagés musique. Je n’avais pas cours l’après-midi pour pouvoir aller au conservatoire mais ça ne m’a jamais vraiment branché.

Si Neysa résonne culture, tu apparais comme le mélomane qui traduit les mots en mélodie. Tu as joué en formation de groupe aussi, avec des potes ? Quels styles ? On peut trouver des sons sur internet ?

J’ai vite rejoins un premier groupe grâce à mon prof de guitare qui est devenu un ami. Milestone, un groupe de pop bien influence par Radiohead à l’époque. On a sorti deux EP qu’on peut écouter sur le net. Ensuite j’ai monté un groupe avec Philippe Thuillier, le chanteur avec lequel j’ai sorti plusieurs EP et un album et pas mal tourné. Cela fait maintenant 1 an et demi que je travaille avec Neysa.

Votre duo a une particularité, vous partagez votre vie sur le devant de la scène, mais également en coulisse, depuis quand êtes-vous en couple ? Vous vous êtes rencontrés comment ?

E: J’ai retrouvé la photo de notre premier rendez-vous non accidentel. Il remonte à 4 ans, Emile m’avait donné rdv à la Porte de Versailles, pour une soirée dans un vrai Bunker datant de la seconde guerre mondiale. Il m’avait dit qu’il viendrait me chercher en char d’assaut, pour célébrer l’anniversaire de l’armistice, ce qu’il a fait.

Vous habitez ensemble dans un atelier du sud-est parisien c’est bien ça ? Comment vous organisez-vous ? 

N: Nous habitons dans la maison de famille d’Emile, là où son père est né, là où il a rencontré sa mère. La pièce dans laquelle nous passons le plus de temps est un long salon étroit, qui donne sur un jardin. Emile se met à l’extrémité de la pièce où il a agencé un petit studio, et je me mets de l’autre côté pour écrire et trouver mes mélodies, au bureau, près de la bouilloire et du radiateur.

Vous vivez musique H24 ou vous avez une autre activité à côté ? A quoi ressemble une semaine type pour vous ?

N: Je pense que l’on peut maintenant dire que l’on est tout le temps dans la musique, bien que je continue à travailler à l’Université Paris 1 où je suis tutrice depuis quelques années.

E: La musique prend pas mal de place dans notre quotidien, pour autant la semaine type n’existe pas vraiment. On n’est pas assez organisé, ni suffisamment méthodique pour définir notre travail en fonction des jours.

Et niveau sorties, vous allez voir d’autres artistes se produire ?

N: Pour ce mois de novembre, j’ai prévu d’aller voir Albe, King Krule et Catastrophe !

Comment ont réagi vos parents dans tout ça ? Plutôt full support ou ont-ils émis quelques réserves ?

N: J’ai des parents difficiles : une mère inquiète, qui aimerait bien que je fasse quelque chose qui me permette d’en vivre. Quant à mon père, le mélomane, je ne suis pas sûre que UTO soit de son goût, il n’aime pas trop les effets avec lesquels je joue.

E: Pour ma part je suis depuis toujours dans un environnement artistique, toute ma famille est dans le théâtre donc full support.

Par rapport à votre progression, comment vivez-vous cette expérience, sentez-vous une émulation ?

N: Les choses commencent à bouger doucement, mais la visibilité nouvelle n’est ni le signe d’une sécurité ni d’une pérennité. Heureusement qu’il nous reste René Char, pour doucement nous dire dans l’oreille : « Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s’habitueront. »

The Beast, cette chanson qui a crevé l’écran au printemps dernier, c’est en référence à un quadrupède qui a partagé la maison avec vous ?

N: C’est vrai qu’on aime bien les bêtes. The Beast n’est pas une référence à un animal réel, mais plutôt à la part animale de l’homme et de la femme.

 

 

Vous faites partie de la grande famille de Pain-Surprises Records, vous alliez à leurs soirées du temps du Colisée ? Comment ça s’est passé avec eux, vous les avez accostés pour leur présenter votre travail ?

E: Non, nous n’étions jamais allés à leurs soirées avant de les rencontrer. La rencontre s’est faite par le biais de mon ami Maxime Pichon, qui venait de sortir le premier morceau de son projet « Isabelle » avec Pain-Surprises. Un vendredi soir il a fait écouté « The No Song » et « The Beast » au label, et le dimanche ils étaient à la maison, donc ça s’est fait facilement.

Que vous apportent-ils dans votre activité, quelles sont leurs responsabilités et leur influence?

N: Ils rendent possible la vie de notre musique après sa conception, donc c’est une vraie charge de temps et de travail à part entière. C’est Etienne, Elliot et Alexis qui contactent les médias jours après jours pour essayer de nous faire une place.

E: Ils sont devenus nos producteurs éditeurs et nos managers. On fait tout ensemble jusque-là, même si musicalement on reste dans notre coin tous les deux avant de leur faire écouter.

Si on devait donner une date pour la naissance du duo UTO, que diriez-vous? Et comment s’est déroulée la fusion de l’univers sentimental et musical? Comme dans les films, t’as joué et elle a posé sa voix..? 

E: Ça n’a pas été aussi évident que ça même si ça s’est fait naturellement, sans qu’on le décide. J’ai mon studio dans le salon et Neysa à toujours écrit des chansons donc un jour (disons le 12 mars 2016) on a commencé à le faire ensemble, et notre premier morceau c’était « The Beast ».

Neysa, tu joues aussi d’un instrument ?

N: Oui j’ai une auto-harpe et un harmonica. J’ai aussi une kora que j’aimerais beaucoup réparer, elle fait un son de pluie. Lorsqu’Emile n’est pas là et qu’il y a urgence, je n’ai aucun problème à aller au piano pour structurer ma mélodie, je peux m’en sortir avec deux ou trois accords. Plus la musique est simple, plus je peux me plonger dans la mélodie vocale et dans le texte.

Emile, tu maîtrises quels instruments / machines ? Où est-ce que vous répétez et  composez ?

E: On travaille la plupart du temps chez nous que ça soit la composition / l’enregistrement ou les répétitions. Moi je fais pas mal de basse dans d’autres projets mais avec UTO je suis plus claviers et machine.

Pour la composition, Neysa écrit le texte et Emile vient l’habiller d’une mélodie ou il n’y a pas de règle ?

N: Il n’y a pas de règle, mis à part que je commence toujours l’écriture d’une chanson par son début, jamais par le milieu ou par le refrain. La plupart du temps Emile fait une boucle et me l’envoie, je trouve une mélodie et j’écris un texte. Mais il peut aussi arriver que je trouve tout, même la ligne instrumentale, si elle est simple, ou bien qu’Emile ait une idée de mélodie voix-lead, mais ce n’est pas le cas dans ce premier EP qui a davantage été un va et vient entre nous.

E: On cherche encore la bonne méthode. Même si la plupart du temps je lui propose une idée sur laquelle elle écrit.

Actuellement vous en êtes où d’ailleurs, période de concerts ou vous êtes sur un nouvel EP ?

E: Ces derniers temps on a mis pas mal de poèmes en musique aussi (Paul Celan, William Blake). Là on répète beaucoup pour les prochaines dates et on avance sur un prochain disque qui sortira au printemps.

Jeudi aura lieu une Release party aux Bains, l’occasion de présenter l’EP « Shelter For The Broken », vous faites souvent des live ? 

N: Lorsque j’ai rencontré Emile, on peut dire qu’il était une vraie bête de scène, à 20 ans il avait déjà fait les scènes impressionnantes telles que La Route du Rock ou Solidays. Moi à côté de ça, je demandais à mes enseignants s’il n’était pas possible de faire deux dissertations pour éviter l’exposé en amphi… La grande timide a une dizaine de concerts à son actif, j’en suis vraiment au début.

E: On a du faire une douzaine de concerts ensemble.

En live, vous êtes plus nombreux sur scène non ?

E: On joue désormais à 3 avec Aloïs Champougny aux drums sur pad.

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour 2018 ?

E: Un beau voyage en Alaska

Prochainement avec UTO : La sortie d’un clip pour « That Itch » avec beaucoup d’orages et une performance filmée réalisée par Neysa pour « The (No) Song ».

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